Alors qu’Air Tahiti renforce sa desserte régionale vers Rarotonga, la compagnie se prépare à renégocier en 2026 la subvention essentielle à la desserte des îles les plus isolées. Derrière ces deux actualités, une même question : comment concilier ambitions de développement, équilibre économique et mission de service public en Polynésie française ?
Deux dynamiques, un même défi : la viabilité du modèle polynésien
L’annonce du doublement des vols entre Tahiti et Rarotonga à partir du 29 juin 2025 illustre la volonté d’Air Tahiti de s’ouvrir davantage à l’international et de diversifier ses sources de revenus. Cette liaison, attractive pour le tourisme et les échanges régionaux, s’inscrit dans une stratégie de croissance et de modernisation de la flotte. Elle permet aussi à la compagnie de proposer des tarifs résidents pour Rarotonga, favorisant l’accès des Polynésiens à cette destination.
Mais en parallèle, Air Tahiti reste confrontée à un autre enjeu majeur : la desserte des 34 îles éloignées, structurellement déficitaire, qui n’est possible que grâce à une subvention annuelle de 1,2 milliard Fcfp versée par le Pays dans le cadre d’une Délégation de Service Public (DSP). Cette DSP, qui sera renégociée en 2026, est au cœur des débats sur la continuité territoriale, l’équité d’accès aux services essentiels et le développement des archipels.
Une équation économique complexe
Le développement de liaisons rentables, comme celle de Rarotonga, peut contribuer à l’équilibre global d’Air Tahiti, mais ne compense pas à lui seul les pertes sur les lignes intérieures déficitaires. La compagnie doit donc jongler entre :
- la recherche de rentabilité sur les lignes internationales ou touristiques,
- la nécessité de maintenir un maillage territorial vital, mais coûteux,
- la pression d’une concurrence accrue, notamment avec l’essor d’Air Moana et l’arrivée de nouveaux appareils sur le marché domestique.
La renégociation de la DSP s’annonce d’autant plus stratégique que le contexte budgétaire du Pays est contraint et que la concurrence impose de revoir le modèle économique du transport aérien inter-îles.
Au-delà des enjeux économiques, Air Tahiti doit aussi composer avec des contraintes opérationnelles strictes, notamment sur les vols à destination des îles éloignées où les pistes sont courtes et les conditions techniques exigeantes. Récemment, la compagnie a lancé une campagne de pesée des passagers aériens pour garantir la sécurité des vols, une mesure qui suscite le débat au sein de la population. Pour en savoir plus sur cette initiative et ses enjeux.
Enjeux pour la population et le développement
Pour les habitants des archipels, la question n’est pas seulement économique : il s’agit d’assurer l’accès aux soins, à l’éducation, à l’emploi et au lien social. La connectivité aérienne reste un pilier de la cohésion polynésienne. Mais l’ouverture régionale, si elle offre de nouvelles perspectives, ne doit pas se faire au détriment du service public.
« Le défi est de garantir à la fois l’ouverture de la Polynésie sur le Pacifique et la solidarité entre les îles », résume un responsable local du secteur aérien.
Quel avenir pour le transport aérien polynésien ?
L’année 2026 sera décisive : la renégociation de la subvention pourrait redéfinir les priorités, les modalités de desserte et la place de chaque compagnie. L’équilibre entre développement régional, rentabilité et service public sera au cœur des discussions, avec un enjeu majeur pour la vie quotidienne des Polynésiens.