Bora Bora : une infrastructure flottante inédite pour réinventer la vie sur l’océan ?

Bora Bora : une infrastructure flottante inédite pour réinventer la vie sur l’océan ?

Entre Bora Bora et Tūpai, un projet d’infrastructure flottante porté par la commune et l’ONG Civilisation Indigo ambitionne de faire de la Polynésie un laboratoire mondial de l’innovation maritime. Objectif : inventer de nouveaux modes de vie et d’activités durables, tout en répondant aux défis du changement climatique et de la pression sur les ressources insulaires.

Une idée née du fenua pour répondre à l’urgence climatique

Bora Bora, avril 2025. Sous le soleil des Îles Sous-le-Vent, la commune de Bora Bora et l’ONG Civilisation Indigo ont officialisé un partenariat inédit : créer une infrastructure flottante expérimentale entre Bora Bora et l’atoll de Tūpai. Ce projet, baptisé Smart Offshore Ecosystem (SOE), veut transformer l’océan en allié face à la montée des eaux, à la pression démographique et à la raréfaction des ressources sur les terres émergées.

« Nous devons inventer de nouvelles façons de vivre avec l’océan, pour que nos enfants aient un avenir ici, sur nos îles », explique Frédéric Pons, président de Civilisation Indigo.

L’initiative s’inscrit dans une dynamique mondiale : les territoires insulaires, en première ligne face au réchauffement climatique, cherchent des solutions pour préserver leur mode de vie, leur culture et leur environnement. Bora Bora, symbole du rêve polynésien, veut devenir un modèle d’innovation et de résilience pour tout le Pacifique.

Un laboratoire flottant, vitrine de l’innovation polynésienne avec le Smart Offshore Ecosystem

Le projet prévoit la construction d’une plateforme multifonctionnelle flottante, conçue pour être autonome, modulable et respectueuse de l’environnement. Pensée comme un véritable « laboratoire du futur », elle accueillera :

  • Un centre de recherche sur les sciences marines et les solutions durables : énergies renouvelables, alimentation, habitats d’adaptation, biotechnologies, récifs artificiels.
  • Une station d’écotourisme scientifique, ouverte aux visiteurs désireux de découvrir la culture polynésienne et les innovations marines.
  • Un espace de formation et de transmission des savoirs, pour la jeunesse polynésienne et les professionnels du fenua.

L’infrastructure sera conçue pour s’intégrer harmonieusement au lagon, sans impact négatif sur les écosystèmes locaux. Les porteurs du projet insistent : il ne s’agit pas de reproduire les erreurs du développement terrestre, mais d’imaginer un modèle en symbiose avec l’océan.

« Ce projet doit être un exemple de ce que la Polynésie peut apporter au monde : l’innovation, la solidarité, le respect de la nature et la valorisation de nos traditions », affirme le maire de Bora Bora.

Des enjeux majeurs pour la population et les archipels

L’infrastructure flottante vise à répondre à plusieurs défis cruciaux pour la Polynésie française :

  • Adaptation au changement climatique : anticiper la montée des eaux et la fragilisation des terres.
  • Autosuffisance alimentaire et énergétique : développer des solutions innovantes pour réduire la dépendance aux importations.
  • Création d’emplois et diversification économique : former les jeunes, attirer de nouveaux métiers liés à l’économie bleue.
  • Préservation de la culture et des savoirs locaux : intégrer les pratiques ancestrales et la langue reo tahiti dans la conception et la gestion du projet.

Les habitants de Bora Bora et des archipels sont invités à participer à la réflexion et à la mise en œuvre. Des réunions publiques, ateliers et campagnes d’information sont prévus pour garantir une acceptation sociale forte et une appropriation locale du projet.

« Il faut que ce soit un projet du fenua, pensé par et pour les Polynésiens. Nous voulons éviter les erreurs du passé, où les grandes décisions venaient de l’extérieur », témoigne Tehani, jeune active engagée dans une association environnementale.

Chronologie et étapes clés du projet

Année Étape Objectif
2024 Signature du protocole d’accord Lancer la coopération entre la commune et Civilisation Indigo
2025-2027 Recherche appliquée, modélisation Constituer l’équipe, lever des fonds, étudier la faisabilité technique et sociale
2028 Prototype expérimental Construire et tester la première infrastructure flottante
2030+ Déploiement progressif Étendre le modèle à d’autres sites, créer une société d’économie mixte

Paroles du fenua : attentes, doutes et espoirs

Les réactions sont partagées à Bora Bora et dans les archipels. Certains voient dans ce projet une chance unique de relancer l’économie locale et de préparer l’avenir :

« C’est une opportunité pour nos jeunes de se former à des métiers d’avenir, ici même, sans devoir partir à Tahiti ou à l’étranger », estime Tane Marama, chef d’entreprise aux Tuamotu.

D’autres expriment des réserves, notamment sur l’impact environnemental, la sécurité et la réelle implication des habitants :

« Il ne faut pas que ce soit un projet réservé aux touristes ou aux grandes entreprises. Il faut que ça profite à toute la population, surtout aux familles modestes », souligne Hina Poma, retraitée engagée à Moorea.

Les porteurs du projet assurent que la transparence et la concertation resteront au cœur de la démarche, avec la volonté de faire de cette infrastructure un bien commun du fenua.

Smart Offshore Ecosystem : un modèle pour l’Océanie et au-delà ?

Si le projet aboutit, Bora Bora et Tūpai pourraient devenir un exemple pour d’autres territoires insulaires confrontés aux mêmes défis. L’ambition affichée est de créer un modèle exportable, adapté aux réalités culturelles et environnementales de chaque archipel.

Ce pari sur l’innovation, la culture et la solidarité polynésienne pourrait bien transformer la manière dont les îles du Pacifique envisagent leur avenir, entre terre et océan.

Qu’est-ce qu’un « Smart Offshore Ecosystem » ?

Un Smart Offshore Ecosystem est une plateforme flottante conçue pour fonctionner de façon autonome, en intégrant :

  • Des énergies renouvelables (solaire, éolien, hydrolien)
  • Des systèmes de production alimentaire (aquaculture, agriculture marine)
  • Des habitats modulables et résilients
  • Des technologies de préservation de la biodiversité (récifs artificiels, monitoring environnemental)

L’objectif est de créer une symbiose entre les activités humaines et l’écosystème marin, tout en réduisant l’empreinte carbone et la dépendance aux ressources terrestres.

Réinventer la vie sur l’océan, un défi polynésien

Le projet d’infrastructure flottante entre Bora Bora et Tūpai ouvre une nouvelle page de l’histoire polynésienne. Il pose la question : la vie sur l’océan est-elle l’avenir des îles ? Si la réussite dépendra de l’implication de toute la communauté, ce pari audacieux témoigne de la capacité du fenua à innover, à s’adapter et à inspirer le monde.

À travers le Smart Offshore Ecosystem, Bora Bora rejoint d’autres initiatives polynésiennes qui placent l’innovation et la préservation au cœur de leur développement. Pour approfondir la réflexion sur les modèles durables et l’écotourisme dans le fenua, découvrez aussi nos articles consacrés aux nouvelles pratiques touristiques responsables en Polynésie et à la gestion exemplaire de l’atoll polynésien Tetiaroa .

Visuel conceptuel – Civilisation Indigo. Illustration d’artiste issue du site indigocivilization.world, représentant une vision du projet Smart Offshore Ecosystem. Il ne s’agit pas d’une photo réelle, mais d’une image d’intention.

À propos de l'auteur :

Hina
Hina Teariki

Hina Teariki est une journaliste polynésienne de 38 ans, née et élevée à Papeete. Diplômée en journalisme de l'Université de la Polynésie française, elle a commencé sa carrière en 2008 comme pigiste pour divers journaux locaux avant de rejoindre Tahiti Presse en 2010. Passionnée par la culture et l'environnement polynésiens, Hina s'est spécialisée dans les reportages sur le développement durable, le changement climatique et la préservation des traditions locales. Elle est connue pour son style d'écriture engagé et ses enquêtes approfondies sur les enjeux sociaux et écologiques du fenua.

Hina Teariki est une journaliste polynésienne de 38 ans, née et élevée à Papeete. Diplômée en journalisme de l'Université de la Polynésie française, elle a commencé sa carrière en 2008 comme pigiste pour divers journaux locaux avant de rejoindre Tahiti Presse en 2010. Passionnée par la culture et l'environnement polynésiens, Hina s'est spécialisée dans les reportages sur le développement durable, le changement climatique et la préservation des traditions locales. Elle est connue pour son style d'écriture engagé et ses enquêtes approfondies sur les enjeux sociaux et écologiques du fenua.

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