Polynésie : quand les fermes perlières ferment, quel avenir pour les atolls ?

Polynésie : quand les fermes perlières ferment, quel avenir pour les atolls ?

La fermeture progressive des fermes perlières dans les atolls polynésiens bouleverse l’économie locale, la vie des communautés et la transmission des savoir-faire. Face à la crise du secteur, de nombreux sites autrefois prospères sont aujourd’hui à l’arrêt ou en reconversion, posant la question de l’avenir pour les habitants et les lagons des Tuamotu et des Gambier.

Un secteur en crise loin de Tahiti

Longtemps moteur économique des archipels, la perliculture polynésienne connaît depuis plusieurs années un déclin marqué, en particulier dans les atolls éloignés. Si Tahiti et quelques grandes îles maintiennent une activité structurée, la situation est bien différente dans les Tuamotu et les Gambier :

  • Fermetures massives de fermes à Manihi, Tikehau, Raroia ou Arutua ;
  • Perte de centaines d’emplois locaux ;
  • Sites laissés à l’abandon, envahis par la nature ou reconvertis en lieux de pêche.

« L’endroit a fermé il y a quelques années lors de la période du Covid. La ferme employait plus de trente personnes à l’époque. »
— Michel, gardien d’une ancienne ferme à Raroia

Pourquoi tant de fermetures ?

Plusieurs facteurs expliquent la multiplication des fermetures dans les archipels :

  • Chute des prix mondiaux de la perle noire, due à la concurrence internationale et à la surproduction ;
  • Coûts logistiques élevés pour acheminer matériel et production depuis les atolls isolés ;
  • Difficulté de transmission des savoir-faire traditionnels, notamment auprès de la jeunesse ;
  • Crise sanitaire du Covid-19, qui a stoppé net les exportations et fragilisé les trésoreries.

Des conséquences humaines et sociales majeures

Le déclin de la perliculture bouleverse le quotidien des familles :

  • Exode des jeunes vers Tahiti ou l’étranger faute de perspectives locales ;
  • Dégradation des infrastructures, pollution résiduelle (plastiques, filets) ;
  • Fragilisation du tissu social et perte d’un patrimoine vivant.

« Nous devons innover pour survivre. »
— Temauri, producteur à Fakarava

Que deviennent les sites abandonnés ?

Face à la fermeture, plusieurs scénarios se dessinent pour les anciennes fermes perlières :

  • Diversification agricole : certaines tentent la culture de la vanille ou l’aquaculture ;
  • Tourisme nature : les lagons désertés attirent désormais plongeurs et passionnés de biodiversité ;
  • Valorisation patrimoniale : des initiatives locales émergent pour préserver la mémoire de la perliculture, organiser des visites ou ateliers pédagogiques.

À Arutua, la Direction des ressources marines accompagne la remise en exploitation de concessions abandonnées, tandis qu’à Tikehau, la nature a repris ses droits sur les anciens parcs à huîtres.

Trois atolls, trois trajectoires

Atoll Situation actuelle Perspectives
Manihi 90 % des fermes fermées, bâtiments en ruine Espoir de reprise, collecte de naissains, attente de repreneurs
Tikehau Activité perlière disparue Tourisme nature, observation de la faune marine
Arutua Fermes abandonnées, relance partielle Diversification, soutien institutionnel, reconversion agricole

Préserver, transmettre, innover : les clés pour l’avenir

La fermeture des fermes perlières ne marque pas la fin de l’histoire pour les atolls polynésiens. Pour de nombreux habitants, il s’agit désormais de :

  • Préserver la mémoire des sites abandonnés et transmettre le savoir-faire aux jeunes générations ;
  • Accompagner la reconversion économique des archipels, en soutenant l’innovation locale ;
  • Protéger l’environnement lagonaire et valoriser la biodiversité retrouvée.

Pour aller plus loin et découvrir les initiatives de transmission et d’innovation, retrouvez notre dossier dédié sur la situation des fermes perlières à Tahiti.

Un défi collectif pour le fenua

La crise des fermes perlières invite à repenser le modèle économique et social des archipels. Entre tradition, innovation et solidarité insulaire, l’avenir des lagons polynésiens dépendra de la capacité des communautés à s’adapter, à valoriser leur patrimoine et à inventer de nouveaux équilibres pour les générations futures.

À propos de l'auteur :

Hina
Hina Teariki

Hina Teariki est une journaliste polynésienne de 38 ans, née et élevée à Papeete. Diplômée en journalisme de l'Université de la Polynésie française, elle a commencé sa carrière en 2008 comme pigiste pour divers journaux locaux avant de rejoindre Tahiti Presse en 2010. Passionnée par la culture et l'environnement polynésiens, Hina s'est spécialisée dans les reportages sur le développement durable, le changement climatique et la préservation des traditions locales. Elle est connue pour son style d'écriture engagé et ses enquêtes approfondies sur les enjeux sociaux et écologiques du fenua.

Hina Teariki est une journaliste polynésienne de 38 ans, née et élevée à Papeete. Diplômée en journalisme de l'Université de la Polynésie française, elle a commencé sa carrière en 2008 comme pigiste pour divers journaux locaux avant de rejoindre Tahiti Presse en 2010. Passionnée par la culture et l'environnement polynésiens, Hina s'est spécialisée dans les reportages sur le développement durable, le changement climatique et la préservation des traditions locales. Elle est connue pour son style d'écriture engagé et ses enquêtes approfondies sur les enjeux sociaux et écologiques du fenua.

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