La méthamphétamine, surnommée « ice », s’est imposée en quelques années comme l’une des menaces majeures pour la société polynésienne. Derrière les chiffres alarmants, ce sont des familles brisées, des parcours bouleversés et un tissu social fragilisé qui témoignent de l’ampleur du fléau. Plongée au cœur d’un phénomène qui bouleverse le fenua.
Un fléau qui s’étend à toute la société
La Polynésie française fait face à une crise majeure : près de 10 % de la population aurait déjà consommé de l’ice, soit environ 30 000 personnes. Ce chiffre a triplé en quelques années, touchant toutes les générations, des quartiers urbains aux îles les plus isolées. Les premiers cas de consommation sont recensés dès l’âge de huit ans, un constat alarmant pour les autorités et les familles.
« Le plus jeune cas identifié à ce jour a seulement huit ans. » — Moetai Brotherson, président du Pays
Quelques chiffres clés
Indicateur | Valeur |
---|---|
Population totale | ~300 000 |
Personnes ayant déjà consommé de l’ice | ~30 000 (10 %) |
Adolescents concernés | 3,5 % |
Hausse des infractions liées à l’ice (2024) | +28 % |
Saisies d’ice en 2024 | +142 % |
Sources : Gouvernement de Polynésie, Tahiti Presse, Le Monde
Un trafic mondialisé, des réseaux organisés
L’ice n’est pas produite localement : elle est importée, principalement depuis la Californie et le Mexique, via des réseaux structurés et connectés aux cartels internationaux. Le trafic profite de la position géographique isolée du territoire et de la porosité des frontières.
- Importation par avion, souvent via des « mules »
- Connexions avec les cartels mexicains et américains
- Blanchiment via commerces locaux
« L’émergence de réseaux organisés dans les quartiers a favorisé la diffusion du produit, le rendant plus accessible. » — Rapport Kairos Consulting
Impact sanitaire et social : familles et société fragilisées
Les conséquences sont dramatiques : troubles psychiatriques, violences, accidents, décrochage scolaire, surendettement, prostitution. Les structures de santé et de justice sont saturées, peinant à répondre à l’ampleur du phénomène.
- Violences intrafamiliales et délinquance en hausse
- Jeunes de plus en plus impliqués dans le trafic et la consommation
- Isolement et stigmatisation des familles touchées
« On ne reconnaît plus nos enfants. L’ice détruit tout : la santé, la famille, l’avenir. » — Mère de famille à Papeete
L’urgence nationale : riposte et mobilisation
Face à cette crise, le gouvernement a déclaré l’urgence nationale en février 2025, lançant un plan d’action doté de 250 millions de francs CFP. Les priorités : prévention, soutien aux associations, création d’un centre de désintoxication, renforcement des moyens de répression.
Mesures principales
- Soutien financier accru aux associations de terrain
- Création d’un centre de désintoxication spécialisé
- Renforcement des contrôles et opérations antidrogue
- Demande à l’État d’alourdir les peines pour les trafiquants
« Il s’agit d’une urgence nationale et vitale pour notre territoire. » — Moetai Brotherson, président du Pays
Actions de terrain : opérations et résultats
Parmi les initiatives les plus marquantes, la récente opération Matai Rorofai illustre la mobilisation des forces de l’ordre à l’échelle de l’ensemble des archipels. Plus de 200 interventions coordonnées ont permis l’interpellation de 52 personnes, la saisie de 2 268 plants de cannabis et de 2,7 millions de francs CFP d’avoirs criminels. Cette action s’inscrit dans la continuité des efforts engagés depuis 2024 pour endiguer les trafics de stupéfiants qui gangrènent le fenua.
Type de saisie | Quantité |
---|---|
Pieds de cannabis détruits | 2 268 |
Ice (méthamphétamine) saisie | Données non précisées |
Avoirs criminels saisis | 2,7 millions XPF |
Personnes interpellées | 52 |
Source : Tahiti Presse
Prévention et accompagnement : les défis à venir
Si la répression s’intensifie, la prévention et l’accompagnement restent les maillons faibles. Le manque de structures spécialisées, l’insularité et l’isolement compliquent la prise en charge, surtout dans les archipels éloignés. Les associations réclament des moyens durables pour accompagner les personnes dépendantes vers la réinsertion.
- Prévention dès le plus jeune âge, notamment à l’école
- Accès aux soins spécialisés dans tous les archipels
- Valorisation de la solidarité communautaire et de la parole des familles
« Sans une action forte et unanime des autorités du Pays, de l’État et des acteurs de proximité, la victoire contre ce fléau n’est pas possible. » — Conseil des ministres de Polynésie
Vers une mobilisation collective
La crise de l’ice en Polynésie française est un défi collectif, sanitaire, social et culturel. La réponse passe par la mobilisation de tous : institutions, associations, familles, société civile. Si la prise de conscience est réelle, la bataille sera longue, mais la résilience du fenua reste un atout majeur.
Pour approfondir : analyse complète sur la déclaration d’urgence nationale dans l’article Tahiti Presse de février 2025.