À l’occasion du sommet mondial de l’océan (UNOC 2025) à Nice, la Polynésie française a officialisé la création de la plus vaste aire marine protégée en Polynésie, couvrant l’intégralité de sa zone économique exclusive. Un engagement historique pour préserver la biodiversité marine — requins, coraux, tortues — tout en garantissant la survie de la pêche artisanale et des pratiques traditionnelles polynésiennes.
Une aire marine protégée en Polynésie à l’échelle du Pacifique
La Polynésie française vient d’entrer dans l’histoire de la préservation des océans en transformant sa zone économique exclusive (ZEE) de 5 millions de km² en aire marine protégée (AMP) reconnue internationalement. Ce classement, acté lors de l’UNOC à Nice, fait du fenua le premier territoire au monde à placer la totalité de ses eaux sous protection officielle, tout en maintenant un équilibre avec les usages locaux.
Le président Moetai Brotherson a salué un « choix fort pour l’avenir du fenua et de la planète », alors que la France s’appuie sur cette décision pour atteindre ses objectifs de 30 % d’océans protégés d’ici 2030.
Pour approfondir les enjeux, le contexte international et les spécificités du nouveau statut, retrouvez notre article précédent sur la démarche la Polynésie à l’UNOC de Nice.
Pourquoi ce changement de statut ?
- Reconnaissance internationale : Le passage d’une aire marine gérée à une aire marine protégée en Polynésie permet d’intégrer pleinement la ZEE polynésienne dans les objectifs mondiaux, avec une visibilité accrue auprès de l’UICN et des Nations unies.[1][7][10]
- Accès aux financements : Ce nouveau statut ouvre la porte à des fonds internationaux dédiés à la gestion durable, à la recherche scientifique et à la préservation des écosystèmes marins.[1][3][7]
- Valorisation du modèle polynésien : La gestion locale, qui combine savoirs ancestraux et innovation, bénéficie d’une reconnaissance nouvelle sur la scène mondiale.[1][2][7]
« Fonctionnellement, c’est la même chose, sauf que là, on est dans une terminologie et une classification internationale. »
— Moetai Brotherson, président de la Polynésie française
Quelles zones de protection renforcée et quelles restrictions ?
La nouvelle aire marine protégée en Polynésie prévoit plusieurs niveaux de protection :
- Protection minimale : La quasi-totalité de la ZEE (environ 4,55 millions de km²) reste ouverte à la pêche artisanale et aux usages traditionnels, sous gestion durable.
- Protection stricte (AMP classe 2) : 900 000 km², soit 20 % de la ZEE, seront totalement interdits à toute activité extractive (pêche, extraction minière, etc.). Deux grandes zones sont concernées :
- Ouest des îles de la Société (220 000 km²), espace d’intérêt biologique majeur pour requins, raies et tortues, mitoyen de zones de pêche industrielle étrangère.
- Aux abords des Gambier (680 000 km²), zone encore peu explorée et sanctuaire potentiel pour la biodiversité.[8][10]
- Protection forte (zone côtière) : 200 000 km² réservés à la pêche artisanale, permettant de préserver les pratiques vivrières et de limiter les conflits d’usage avec la pêche industrielle.[9]
Statut | Superficie | Restrictions | Usages autorisés |
---|---|---|---|
AMP classe 6 (ZEE entière) | 4,8 M km² | Contrôles renforcés, pas d’extraction minière, biosécurité | Pêche artisanale, pratiques traditionnelles |
AMP classe 2 (no-take) | 900 000 km² | Interdiction totale de pêche et d’extraction | Recherche, éducation, écotourisme contrôlé |
Zone côtière protégée | 200 000 km² | Pêche artisanale uniquement | Pêche vivrière, usages locaux |
Quel impact pour la pêche artisanale polynésienne ?
La pêche artisanale et les pratiques traditionnelles restent au cœur de la gestion durable de l’aire marine protégée en Polynésie. Hors des zones strictes, les pêcheurs locaux conservent un accès à la ressource, avec un accompagnement prévu pour s’adapter aux nouvelles règles. Le gouvernement s’engage à maintenir la concertation avec les professionnels et les communautés des cinq archipels.
« La protection de notre océan, c’est aussi la protection de nos emplois et de notre avenir. »
— Tane, chef d’entreprise à Fakarava
- Plan de gestion spécifique pour la pêche palangrière durable, afin de préserver les stocks tout en assurant la sécurité alimentaire des îles.
- Rāhui (interdictions temporaires de pêche) remis au goût du jour dans plusieurs lagons, avec des résultats déjà visibles sur la biomasse.[2]
- Formation et accompagnement pour les jeunes et les pêcheurs, via des programmes éducatifs et le futur lycée de la mer.[2][3]
Quels financements internationaux pour préserver les écosystèmes marins ?
Le nouveau statut d’aire marine protégée en Polynésie ouvre l’accès à des financements inédits :
- Fonds de l’UICN et du Programme des Nations unies pour le développement (PNUD) pour la surveillance, la recherche et la gestion participative.[1][3][7]
- Fonds Pacifique : en 2025, 14 projets polynésiens ont déjà été soutenus, dont plusieurs pour la restauration des récifs coralliens et la formation aux métiers de la mer.[3]
- Partenariats avec l’Union européenne et grandes ONG pour soutenir les initiatives locales dans tous les archipels.
« Grâce au Fonds Pacifique, nous avons pu lancer une formation pour les jeunes sur les métiers de la mer. Cela va favoriser l’emploi local et la transmission de nos savoirs. »
— Responsable associatif, Tuamotu
Un modèle polynésien de gestion marine renforcé
La reconnaissance mondiale de l’aire marine protégée en Polynésie valorise un modèle unique : gestion locale, implication des communautés, intégration des savoirs ancestraux (rāhui, pêche vivrière), innovations scientifiques (supercoraux, biosécurité). Ce modèle est désormais cité en exemple lors des grands rendez-vous internationaux, comme l’UNOC à Nice.
- Gouvernance partagée : comités de gestion impliquant élus, pêcheurs, associations et scientifiques.
- Transmission des savoirs : les pratiques traditionnelles sont remises au cœur des politiques publiques.
- Adaptation aux réalités des archipels : chaque zone bénéficie d’une approche différenciée, en concertation avec les habitants.
« Nous sommes fiers que la Polynésie porte la voix du Pacifique Sud à l’ONU, mais il faut veiller à ce que les décisions prises respectent nos réalités insulaires et nos traditions. »
— Tehani, habitante des Tuamotu
L’expérience de terrain et l’engagement de scientifiques sont essentiels pour comprendre la réalité des écosystèmes insulaires. Découvrez le témoignage inédit du biologiste Matthieu Juncker, qui a choisi de vivre en immersion sur un atoll des Tuamotu, dans notre article consacré à l’observation scientifique en milieu polynésien.
Enjeux et perspectives pour la Polynésie et ses archipels
- Reconnaissance et financements internationaux pour la préservation de l’océan Pacifique Sud.
- Valorisation des savoir-faire locaux en matière de gestion durable et de concertation.
- Maintien des activités économiques et traditionnelles pour les pêcheurs et habitants des cinq archipels.
- Dynamique de concertation avec les acteurs locaux avant toute restriction supplémentaire.
- Renforcement de la surveillance et de la lutte contre la pollution, avec l’appui de l’État et des partenaires internationaux.[8][10]
L’essentiel sur l’aire marine protégée en Polynésie
- 5 millions de km² concernés par le futur classement en aire marine protégée en Polynésie.
- Un modèle polynésien qui s’exporte à l’international et inspire la gouvernance des océans.
- Des enjeux économiques, culturels et environnementaux au cœur des débats.
- Un engagement collectif pour la préservation de Te Moana Nui a Hiva, patrimoine commun de tous les archipels.
En s’inscrivant dans la dynamique mondiale de l’UNOC, la Polynésie française affirme sa spécificité : un territoire insulaire immense, riche de ses cultures et de ses savoirs, mais aussi acteur responsable de la planète bleue.