Alors que la Polynésie française était représentée au sommet mondial de l’océan à Nice, le Tavini Huiraatira a choisi de boycotter l’événement. Oscar Temaru et Tony Géros ont dénoncé lors d’une conférence de presse ce qu’ils qualifient d' »entre-soi diplomatique des puissances maritimes » et critiquent le fait que « la France parle à la place de la Polynésie ». Le parti indépendantiste revendique une représentation directe dans les enceintes océaniques internationales.
Le maire de Nice avait pourtant adressé une invitation officielle au Tavini Huiraatira pour participer au sommet mondial de l’océan. Mais Tony Géros, président du parti indépendantiste, a préféré décliner et organiser une conférence de presse à Tahiti pour exprimer sa position critique face à cet événement international qui se tenait du 9 au 11 juin sur la Côte d’Azur.
« Nous ne participerons pas à ce forum de discussion où l’État français continue de parler à notre place », a déclaré Tony Géros, accompagné d’Oscar Temaru. Cette prise de position tranche avec l’enthousiasme affiché par les autorités locales face aux annonces gouvernementales sur la création d’une nouvelle aire marine protégée en Polynésie française.
Pour le Tavini, l’UNOC 2025 illustre parfaitement les limites de la représentation polynésienne sur la scène internationale. Le parti revendique le droit pour la Polynésie de « parler de sa propre voix » dans les instances dédiées à la gouvernance océanique, estimant que les enjeux du Pacifique Sud ne peuvent être correctement défendus que par les populations directement concernées.
Un refus assumé malgré l’invitation officielle
L’invitation du maire de Nice au Tavini témoignait d’une volonté d’associer l’ensemble des forces politiques polynésiennes à cet événement d’envergure internationale. Mais pour Tony Géros, participer à l’UNOC aurait constitué une forme de caution à un système qu’il dénonce.
« L’UNOC, ce sont des discours verts pour des pratiques grises. Nous refusons de cautionner cette mascarade où les grandes puissances se donnent bonne conscience en parlant d’environnement tout en continuant leurs pratiques destructrices », a expliqué le président du Tavini lors de la conférence de presse du 11 juin.
Cette position s’inscrit dans la ligne politique constante du parti indépendantiste qui revendique une souveraineté polynésienne sur les questions océaniques. Pour le Tavini, la Polynésie française ne peut être authentiquement représentée que par ses propres élus, et non par l’État français qui défend avant tout ses intérêts géostratégiques dans le Pacifique.
Critique de « l’entre-soi diplomatique »
Oscar Temaru, figure historique de l’indépendantisme polynésien, a particulièrement insisté sur ce qu’il qualifie d' »entre-soi diplomatique des puissances maritimes ». Cette expression vise à dénoncer un système où les décisions concernant les océans sont prises par les grandes puissances sans véritable consultation des populations insulaires directement concernées.
Selon le Tavini, l’UNOC 2025 illustre parfaitement cette logique : les annonces sur l’aire marine protégée en Polynésie française ont été faites par le gouvernement français sans consultation préalable approfondie des Polynésiens eux-mêmes.
« Nous apprenons les décisions qui concernent notre fenua par la presse ou lors de sommets auxquels nous ne sommes pas vraiment associés. C’est inacceptable pour un territoire qui revendique plus d’autonomie », a souligné Oscar Temaru.
Cette critique contraste avec le succès rencontré par le Tãura polynésien qui a conquis Nice, démontrant que la présence culturelle polynésienne peut rayonner internationalement tout en soulevant des questions sur la représentation politique du fenua.
Une proposition alternative de gouvernance
Loin de se contenter de critiquer, le Tavini a profité de cette conférence de presse pour présenter ses propres propositions en matière de gouvernance océanique. Le parti indépendantiste plaide pour une représentation directe de la Polynésie française dans les instances internationales dédiées aux océans.
Tony Géros a annoncé le dépôt prochain d’une résolution à l’assemblée de la Polynésie française demandant :
- La reconnaissance du droit de la Polynésie à siéger directement dans les forums océaniques internationaux
- La consultation obligatoire des élus polynésiens avant toute décision française concernant les eaux territoriales du fenua
- La création d’une instance polynésienne autonome de gestion des ressources marines
Un débat qui dépasse l’UNOC
Cette controverse autour de l’UNOC révèle en réalité des tensions plus profondes sur le statut de la Polynésie française et sa représentation internationale. Pour le Tavini, les questions océaniques constituent un enjeu majeur de souveraineté qui justifie une évolution du statut d’autonomie actuel.
La position du parti indépendantiste contraste avec celle des autres formations politiques locales qui ont globalement salué les annonces gouvernementales lors du sommet de Nice. Cette divergence illustre les clivages persistants au sein de la classe politique polynésienne sur les relations avec l’État français.
« Nous ne sommes pas contre la protection de nos océans, bien au contraire. Mais nous voulons être les acteurs de cette protection, pas de simples spectateurs des décisions prises ailleurs », a conclu Tony Géros.
Le débat lancé par le Tavini autour de l’UNOC 2025 s’annonce donc comme un nouvel épisode des discussions sur l’évolution institutionnelle de la Polynésie française. Les prochains mois diront si cette revendication d’une voix polynésienne autonome dans les instances océaniques internationales trouvera un écho au-delà des seuls partisans de l’indépendance.