Pollution, braconnage, traditions : ce que révèle le rapport du CESEC sur notre océan

Pollution, braconnage, traditions : ce que révèle le rapport du CESEC sur notre océan

À quelques semaines du Sommet mondial des océans, le Conseil économique, social, environnemental et culturel (CESEC) de Polynésie française publie un rapport inédit sur l’état de santé de Te Moana Nui a Hiva. Entre menaces croissantes, retour des pratiques ancestrales et mobilisation des habitants, ce document dresse un état des lieux sans concession du patrimoine marin polynésien et propose des pistes concrètes pour préserver ce trésor commun.

Un océan sous pression : constats alarmants

Le rapport du CESEC, fondé sur une vaste consultation au fenua, met en lumière une préoccupation largement partagée : 85 % des Polynésiens interrogés considèrent les déchets plastiques comme la principale menace pour le lagon. Cette pollution s’ajoute à d’autres pressions majeures : braconnage, surexploitation des ressources halieutiques, impacts du changement climatique.

« L’océan n’est pas qu’un espace à exploiter, mais un patrimoine vivant et culturel », rappelle le CESEC dans son rapport.

Face à ces menaces, les habitants expriment une inquiétude croissante pour l’avenir de leur environnement marin, pilier de la culture, de l’économie et de la vie quotidienne dans les archipels.

Le retour du rāhui : traditions et renouveau local

Parmi les réponses à ces défis, le rāhui – pratique ancestrale d’interdiction temporaire de pêche – fait un retour remarqué : plus de 90 % des personnes consultées soutiennent sa réintroduction. À Tautira et Teahupo’o, les rāhui instaurés récemment montrent déjà des résultats tangibles : poissons plus gros, biomasse en augmentation.

« Ces deux rāhui semblent bien fonctionner. Les tailles des poissons sont plus importantes à l’intérieur qu’à l’extérieur. C’est donc un signe qui démontre que ces deux rāhui créent de la biomasse », analyse Jean Wencélius, anthropologue.

Pourtant, le braconnage reste un problème persistant. Mais la perception évolue : certains pêcheurs, autrefois sceptiques, deviennent aujourd’hui des défenseurs actifs de ces zones protégées, conscients des bénéfices pour la régénération des ressources.

Des solutions concrètes pour l’avenir du lagon

Le CESEC ne se limite pas au constat et avance plusieurs recommandations phares :

  • Créer un lycée de la mer pour former la jeunesse polynésienne aux métiers et à la gestion durable de l’océan.
  • Interdire les dispositifs de concentration de poissons (DCP) dérivants en haute mer, responsables de la surpêche.
  • Renforcer la protection des récifs coralliens, essentiels à la biodiversité et à la subsistance des populations.
  • Remettre les savoirs traditionnels au cœur des politiques publiques, afin d’adapter la gestion des ressources aux réalités locales.

Former une nouvelle génération d’ambassadeurs de l’océan passe également par des programmes éducatifs innovants. Le projet Blue Ocean, lancé au lycée Diadème, ouvre de nouvelles perspectives aux jeunes Polynésiens en les orientant vers les métiers de la mer et la préservation de l’environnement marin. En savoir plus sur cette formation et ses ambitions pour la jeunesse du fenua.

Enjeux Propositions du CESEC
Pollution plastique Campagnes de sensibilisation, réduction à la source, gestion renforcée des déchets
Braconnage Contrôles accrus, implication des pêcheurs, soutien aux rāhui
Formation Création d’un lycée de la mer, valorisation des métiers maritimes
Traditions Intégration des savoirs ancestraux dans la gouvernance

La dynamique de préservation et d’innovation s’appuie aussi sur le soutien à de nombreux projets polynésiens portés par des associations, des collectivités ou des acteurs économiques. Plusieurs initiatives récentes, financées dans le cadre du Fonds Pacifique, visent à renforcer la résilience des archipels face aux défis environnementaux, à restaurer les récifs coralliens ou à valoriser les savoir-faire locaux. Découvrez comment ces projets contribuent concrètement au développement durable du fenua.

Une mobilisation de tous les archipels

Le CESEC insiste sur l’importance d’une approche adaptée à la diversité du fenua : chaque archipel – Marquises, Tuamotu, Australes, Gambier, Îles du Vent et Sous-le-Vent – fait face à des réalités spécifiques. Cette diversité doit être prise en compte pour assurer une préservation équitable et durable du patrimoine marin.

La parole est donnée aux communautés locales, aux pêcheurs, aux jeunes, qui sont invités à devenir acteurs de la préservation de leur océan. Le rapport souligne l’importance d’une gouvernance partagée, fondée sur la concertation et la transmission des savoirs.

Un rapport pour éclairer les choix de demain

Avec ses 107 pages, ce rapport du CESEC se veut une boussole pour les décideurs et la société polynésienne. Il alerte sur l’urgence d’agir, tout en proposant des solutions concrètes et adaptées au contexte local.

« C’est notre avenir qui se joue. Préserver Te Moana Nui a Hiva, c’est préserver notre identité, notre économie et la vie de nos enfants », témoigne un habitant de Fakarava.

Alors que la Polynésie française s’apprête à porter sa voix au Sommet mondial des océans, ce rapport rappelle que l’avenir du fenua passe par la préservation de son océan, trésor partagé de tous les archipels.

À propos de l'auteur :

Hina
Hina Teariki

Hina Teariki est une journaliste polynésienne de 38 ans, née et élevée à Papeete. Diplômée en journalisme de l'Université de la Polynésie française, elle a commencé sa carrière en 2008 comme pigiste pour divers journaux locaux avant de rejoindre Tahiti Presse en 2010. Passionnée par la culture et l'environnement polynésiens, Hina s'est spécialisée dans les reportages sur le développement durable, le changement climatique et la préservation des traditions locales. Elle est connue pour son style d'écriture engagé et ses enquêtes approfondies sur les enjeux sociaux et écologiques du fenua.

Hina Teariki est une journaliste polynésienne de 38 ans, née et élevée à Papeete. Diplômée en journalisme de l'Université de la Polynésie française, elle a commencé sa carrière en 2008 comme pigiste pour divers journaux locaux avant de rejoindre Tahiti Presse en 2010. Passionnée par la culture et l'environnement polynésiens, Hina s'est spécialisée dans les reportages sur le développement durable, le changement climatique et la préservation des traditions locales. Elle est connue pour son style d'écriture engagé et ses enquêtes approfondies sur les enjeux sociaux et écologiques du fenua.

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